Cela fait une semaine que j’ai mal au dos. Cette douleur ne ressemble guère à celle qu’on éprouve après être resté plusieurs heures en face de l’ordinateur : ce n’est pas ma tension qui la cause, ni ma lassitude. Non, c’est quelque chose d’angoissant, quelque chose qui va au-delà d’une banale myalgie, qui assaille, en outre des muscles raidis, mon âme, qui m’arrache des cris de colère et des vers bilieux. Mon médecin m’a prescrit un relaxant musculaire, mon épouse veille à ce que je le prenne en cas de nécessité, et pourtant, la douleur n’en devient pas moins lancinante, le remède n’étant qu’un prétexte pour qu’elle se renouvelle. Il s’agit de la poésie plutôt que de la médecine : si le cœur du poète ressent toutes les joies de la terre, ses épaules en soutiennent forcément tous les chagrins. Mais qui a des épaules, ici-bas, pour les soutenir ? Même Atlas se courbait, dit-on, sous le poids du ciel, et son corps était un rocher, au contraire du mien ! J’écris donc poème sur poème au lieu de prendre mon relaxant, et le monde finit par savoir que j’ai mal au dos.
