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Francis LEDER

Sextine de l'amoureux

Je reste sur le banc, comme un pauvre crétin
Prostré là, immobile, où tu t’étais assise,
À pleurer en silence et me tordre les mains
En rêvant des paroles qui t’auraient conquise
Si j’avais du talent ou si j’étais malin.
Tu aurais pu m’aimer, ça, quoi que tu en dises.

C’est sans doute stupide, il faut que je te dise :
Je ne suis pas de tous (de loin) le plus crétin,
Sans être, pour autant, infiniment malin.
Tu me tournes le dos tout en restant assise,
Je te crois tout de même un petit peu conquise,
C’est ce que j’ai compris en regardant tes mains.

Ton secret se trouve être entre de bonnes mains ;
Les hommes sont idiots, veux-tu que je te dise ?
Ils s’imaginent tous être en terre conquise,
Tous muscles en avant et sourires crétins,
Ces petits séducteurs à l’ego sans assise !
Mais sans être grand clerc, moi, je suis plus malin…

Quoiqu’il n’est pas malin de se dire malin !
Je rêverais aussi de te prendre la main,
Et t’écouter parler, douillettement assise
Je m’enthousiasmerais à tout mot que tu dises…
Assurément, je sais, je passe pour crétin,
Et tu ne sembles là ni réjouie ni conquise !

Promets que tu diras quand je t’aurai conquise ;
Je ne le verrai pas, Cupidon est malin
S’il fait la femme fine, il rend l’homme crétin,
Nous sommes des jouets manœuvrés par ses mains.
Les fantasmes sont laids, s’il faut qu’on se les dise,
Mais aucun d’eux ne vaut, c’est sûr, la cour d’assises !

Je t’imagine aussi debout, couchée, assise
Et nous ferions l’amour, et tu serais conquise…
Partages-tu mon goût, je veux que tu me dises,
Pour ce genre d’ébats offerts aux moins malins
Qui s’aident au plaisir par la douceur des mains ?
Voilà, j’ai tout gâché, je suis un vrai crétin !