Nous eûmes un hiver tout rempli de parfums, Le givre doux fondait sur nos lèvres pucelles, On aurait dit un spectre à nos baisers sans fin; J'étais un grand garçon et vous étiez de celles Dont les fleurs sont des faims.
Nous eûmes un printemps pétri de vagues brunes Coulantes à éclore ivresses et sanglots, Sous d'oranges néons et les reflets des lunes Vous en souvenez-vous, nous avions de doux mots A la place des runes.
Nous eûmes tôt l'été, ses soirs et ses rayons Comme tout pénétrant l'étrangeté des roses Que nous tissions souvent comme des médaillons Inscrits à notre chair prise d'or et de choses Traversant les haillons.
Et nous eûmes mortels les sanglots de l'automne, Comme l'on prend parfois des échardes au cœur, Octobre ayant raison de l'ennui qui frisonne Aux portes de l'horloge et du vent frais moqueur A la jeunesse bonne !