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Erwan AMIRI

L'homme sur la digue-frontière

Marchant sur son rempart quand guette la tempête
Il balance les bras qui s’appuient contre l’air

Il tâtonne le noir oscillant de la tête
Ses deux pieds bout-à-bout grignotant la frontière


Sur sa gauche
Une rangée de pieux élimés et saumâtres
A la plante des pieds plantés dans le sablon
Sur sa droite
Les pavés bien rangés d’une route grisâtre
Au maillage pavé de bonnes intentions


Les embruns éventés d’une voix indicible
Lui crucifient le dos des flèches du passé

Et le sel sur ses plaies incendie l’invisible
Brûlant ses chairs à vif en son corps engoncées


Sur sa gauche
Le cheval au galop d’une mer déchainée
S’approchant du Sillon sur le dos des marées

Sur sa droite
Des machines de fer à l’asphalte enchainées
Qui filent à l’indienne en un raz-de-marée


Il glisse pas à pas sur les lignes jointures
Ignorant le fracas des bourrasques de mer

Il plisse en pas de vis en signe de torture
Déplorant les tracas des tarasques de terre


Sur sa gauche
Pleine mer pourléchant de ses lames la pierre
Sur le fil d’une langue à l’essieu lacéré
Sur sa droite
Pleine terre imbibant de ses drames l’empierre
Sur les murs exsudés d’une ville empourprée


Sa démarche branlante enfreint la gravité
Contre les gerbes d’eau qui giclent par paquets

Et les rues tout autour transpirent d’anxiété
Entre peur et mousson dessous leurs parapets


Sur sa gauche
Des corsaires d’écume à l’assaut de la digue
Derrière les canons dégorgeant d’explosifs
Sur sa droite
Des cravates de soie plongées dans une gigue
Devant l’orgie de biens tout aussi corrosifs


Il flirte avec la vie sous les bombes de mer
En plein chambardement des trombes excitées

Il flirte avec la mort sur la tombe des terres
Evitant le chambard dément de la cité


Sur sa gauche
Déferlement de crocs par stridentes saccades
Qui pénètrent la rue jusqu’à l’inondation
Sur sa droite
Des claquements de dents du fond des barricades
Qui craignent pour leurs biens cette eau de destruction


Détournant l’embarras de choisir son côté
Il sait tout simplement qu’il ne faut pas tomber

Il marche droit devant contre vents et marées
Sans descendre du mur sauf contraint et forcé


Sur sa gauche
La mort
La vie
Sur sa droite
La vie
La mort

Et lui entre les deux