Vos
poèmes

Poésie Française : 1 er site français de poésie

Vos<br>poemes
Offrir
ce poème

Dolores SCHWARTZ

Le banc


Ce matin d’automne, j’étais en avance,
Le soleil perçait le feuillage dense,
J’humais l’air doux avec délice.
Laissant une envie dominatrice
Ralentir mon pas, et chercher
Pour m’asseoir un banc bien situé.

Je vis soudain, au détour d’une allée,
Récemment peint, le siège convoité.
Je m’installais illico dans ce recoin
Pour lire la presse gratuite du matin.
Les nouvelles n’étaient pas captivantes,
Pourtant assise là, je les trouvais passionnantes.

Ce banc pour moi, en particulier,
Me donnait un sentiment de supériorité,
Je pris l’habitude de m’y arrêter tous les jours,
Impatiente de le retrouver, il attendait mon retour.
Ce rancard quotidien présageait une journée légère
Même l’hiver ne me faisait renoncer à ce plaisir solitaire.

Mon banc, à l’écart, ne suscitait pas de convoitise,
Et je pouvais, dès potron-minet, en profiter à ma guise.
Ma jalousie fut mise à l’épreuve, cependant,
Une grosse dame, au début du printemps,
Squattait, de son séant, ma place en son milieu.
J’entrepris l’envahisseur pour qu’il quitte les lieux.

Tous les matins à mon heure, elle était là.
Entourée de pigeons guettant leur repas.
Cherchant un moyen définitif, et en attendant,
Je soulevais de mes pieds la poussière en marchant,
Croyais avoir gagné, en la voyant toussoter,
Puis émiettais mon déjeuner, détournant les ramiers.

Ce ne fut pas facile, mais elle finit par perdre courage.
Et longtemps je jouis seule de cet apanage.
Je regardais vieillir mon banc, un peu moins vert,
Ses lattes s’écaillaient et ses pieds sortaient de terre.
Je me dis qu’en conscience et sans regret, il serait temps,
Maintenant, de laisser à d’autres ce vieux banc.