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Célédonio VILLAR GARCIA

L’être d’hiver

Je m’ouvre comme un livre, une sombre caverne,
Une aube encore noire où le chien du matin
Sans être loup-garou, trêve de balivernes,
N’en est pas pour autant le Milou de Tintin.

J’étais ce que je suis : deux êtres se confondent,
Deux pareils, deux « Moi-même ». Aux lauriers de César,
Une queue de persil, sous les neiges qui fondent,
S’unit au thym blanchit par le sel du hasard.

Le teint devient plus blême et les neiges moins blanches,
La paupière moins haute et les cheveux plus gris,
Le crâne dérangé par l’arrêt d’une clenche
Immobile dans la pêne du sans-abri.

L’obstinément têtu trouve devant la porte,
Dans le trousseau, les clés de stupides princi-
-pes qui dans la serrure à chaque tour m’exhortent
Et me poussent encore à demeurer ainsi.

Suis-je une page vierge ou suis-je une œuvre dense ?
Une trace de bête aiguillant le penseur
Se meut, l’air hébété, comme une chèvre danse
Follement dans les champs des jonquilles en fleurs.

Je suis lettre d’hiver sur des rondins, dans l’âtre,
L’indifférence éteinte aux cendres des graviers.
Brûle-t-elle d’amour pour ceux que j’idolâtre ?
Aux quatre vents hurlant deux fois : « Si vous saviez ! ».

Elle enveloppe tout du géronte immature.
Tout du reste d’ailleurs se cache édulcorant
L’implacable déni de l’hostile nature
D’une corniche haute ôte des cormorans.

Le cœur fossilisé redémarre le rite
Du silence immuable entre nous malfaisant
Comme un écho d’avril de chaque marguerite
Arracherait des mots complètement taisant.

Où la dague des mots pour toute une famille
Toute soustraite de toute négation
Racle, sinon le cœur, les gousses de vanille
Comme un piment de feu dans la crémation.

Des bouquets de tendresse ou des paquets de nouilles ?
Après l’escargot court le jeune lévrier,
Mon pas qui danse avec des cuisses de grenouilles
Comme un vingt-neuf derrière un trente février.

Vous qui n’êtes pas loin ni trop près mais en face,
Les rossignols dormeurs et les serins blasés
Piaffent depuis toujours : « Les amis on s’en passe ! »
Et finalement je ne m’en suis pas passé.

En finirais-je un jour de vous rendre visite ?
Du 31 décembre aux basques du second
Je marche… Je m’arrête. Immobile, j’hésite
À dévêtir mon être immensément abscons.

Je suis un pic à glace et je n’ai pas de manche
Ni de second couteau ni des crocs de boucher
Simplement des mots las qui lisent le dimanche
Au chevet de l’aurore avant de se coucher.

Que mes rêves obscurs, de trente-six chandelles,
Éclaire votre monde aux yeux du loup-cervier
Où, frissonnant je rêve aux fraîches chanterelles
Sous la grêle du soir d’un chemin forestier.