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Arwen GERNAK

Mémorial.

Foulant un jour le sable où ne se voit plus rien,
Moi, je me demandais : à quoi sert la musique ?
Le sable est la poussière d’un monde dynamique,
Dont aucun souvenir n’a gardé quelque bien.

Sous quelques pieds de terre, la cendre des torchis
Dont se couvraient les murs des huttes de nos pères,
Au hasard des travaux, nous livre leurs repères ;
Je l’ai prise en mes mains, plus d’une fois jadis.

Des gens ont tant peiné, au long des vieux hivers,
Et d’autres plus heureux riaient dans les soirées,
En se faisant servir par des gens en livrées ;
Ils se croyaient déjà, les rois de l’univers.

Je revois une femme, avançant lentement,
Par le chemin des bois, des champs et des villages,
Pauvre en son manteau noir et ses rides au visage ;
Elle allait voir sa fille au sana du couvent.

Dans ma mémoire encore elle passe toujours ;
Pourtant depuis des ans, l’une et l’autre sont mortes ;
C’est l’ardeur d’un amour qui sans cesse les porte
Et leur permet de vivre, à l’ombre de mes jours.

Démontant le rouage et les précieux versets
Qui renfermaient tout l’art d’une églogue latine,
Un lettré d’autrefois, brimant l’âme enfantine,
N’avait foi qu’au langage et à ses vieux secrets.

Dans cette sage pose, eut-il alors raison ?
C’est en me souvenant de cette rhétorique,
Qu’aujourd’hui, je prends à parti la musique,
Confiante, moi aussi, dans l’articulation

Savamment agencée et le contrat secret
Où se lient les mots, garants de nos pensées.
J’en prévois l’édifice et la forme, ruinés,
Car le temps s’en va, part avec mes regrets.

Mon poème s’assemble et je voudrais qu’il dure,
Survivant édifice et mémorial effet ;
Le mot n’est qu’une brique au pied d’un mur défait,
La pensée vivante est une architecture....

Epure, elle vivra ce qu’entend la nature....
Mais la nature est sourde et je suis seule en fait.


28-10-05