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Stéphane SEVESTRE

La Chenille et le Paon

Une chenille molle pendait à une feuille
D’un petit noisetier, balancée par le vent,
De-ci, de-là, bourgeon que jamais on ne cueille,
Sans même une complainte car la bouche tissant
Ce qui lui tiendra lieu d’écrin de pur argent,
Tombeau mystérieux, berceau des premiers ans
D’un destin attendu, comme firent ses aînées
Suspendues avant elle aux grappes agrippées.
Un Paon passait par là, l’oeil bas, préoccupé
Par sa belle silhouette et par sa queue huppée,
N'humant point l’air ambiant, laissant le ver
pendant
Devant son propre bec. Ses lunettes chaussant
Il découvre la bête: “Jamais je n’avais vu
D’aussi drôle animal. Qu’il soit ainsi tordu,
Sauf votre respect, l'est par une maladie.
Il faudrait cent leçons pour être mieux bâti”,
Dit le plus beau des deux. La chenille coite,
De bêtise croit le fat, balance avec la hâte
De l’escargot timide. Le drôle de coq entame:
“Il est de mon honneur de t’enseigner tout haut
Sur les habits et l’or que tu devra vêtir
Dessus tes oripeaux. Prends mon exemple, sire :
Tient-toi debout, prends tout de haut, toise
les âmes
Elargis ton poitrail, ou ce qui semble l’être.
De la meute soit tête, ainsi tu sera maître”.
La chenille frémit, s’entortille davantage
Puis comme la corolle du bouton se dégage
Ouvre là sa chemise, sort de sa chrysalide.
D’une manière exquise les ailes gracieuses
Arborent mille couleurs et formes majestueuses
Laissant le prétentieux volatile livide.
Comme Jean le dirait
Il n’est digne à tous
Que de savoir puiser
A sa propre fontaine
L’eau de la pure source.
Cette maxime est mienne.