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Roger VIDAL

Les bruits

Ne t’es-tu point surpris, attentif sans vouloir,
A l’écoute d’un bruit, légère dissonance,
N’as-tu jamais connu, dans la nuit d’un couloir,
L’espoir qu’il n’était plus le vide de l’absence ?
Ne t’es-tu point surpris, en montant l’escalier,
Guettant obstinément, guettant avec patience,
Un bruit dans le grenier, un bruit sur le palier,
Qui serait familier comme une connaissance ?
N’as-tu jamais ouï sans aucune raison
Le craquement furtif d’une latte en souffrance,
Le frôlement léger, le soir, dans ta maison,
D’un pied sur le plancher qui marche avec prudence ?
N’as-tu jamais perçu, durant quelques instants,
L’invisible, en ton dos, impalpable présence,
Et qu’en te retournant tu verrais sûrement
Cette réalité ou cette évanescence ?

Une porte qui geint ou un volet qui bat,
Un rêve dans la nuit, un lambeau d’espérance.
Illusion de nos sens que la raison combat,
Tout ne serait-il donc que dans les apparences ?
Les bruits survivent-ils au départ des vivants ?
Souffles résiduels de nos propres essences,
Témoignages ténus de ce qu’auparavant
Fut la vie en ces lieux où règne le silence.
Et ne seraient-ils pas un peu de nos mémoires,
Ce qu’il reste de nous, folles réminiscences,
Notre prolongement, surplus de notre histoire,
L’épilogue vécu, au terme des partances ?
Les ondes qu’on émet, portées à l’infini,
Les lumières, les sons et les voix de l’enfance,
Tout cela s’éteint-il où le monde finit,
Ou est–il renvoyé des univers immenses ?

Me parle bien, la nuit, dans la langue du vent,
De toute certitude elle dit l’innocence,
Elle me dit parfois, elle me dit souvent,
Ce qui peut se cacher derrière l’évidence.
Serait-ce de l’espoir ou de nos désespoirs,
De nos désirs frustrés que naissent les croyances ?
Que traduisent ces mots : « Ce n’est qu’un au revoir»
Sinon que tout finit là où tout recommence ?
Ah ! S’il n’est de réel que dix et dix font nombre,
Et que rien ne puisse être, hormis les existences,
Que tombe le rideau sur ce théâtre d’ombres
Et que solitude s’appelle « Indifférence ».