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Renaud BOSC

Sky road

Sur la sky road, je marche, un soir au crépuscule
A l’heure où le soleil, dans son agonie, brûle
Avant de disparaître au bout de l’océan
Dont il me semble ouïr le souffle maugréant.
Autour de moi, ce n’est qu’un spectacle de pierre,
Un chaos indistinct où seule, une herbe austère,
Du règne végétal, est le représentant
Mais a colonisé le lieu depuis longtemps.
Envoyés, dirait-on, de la mer toute proche,
Reposent, déchirés, des plans d’eau où ricochent
Les rayons du soleil vers le ciel enflammé
Dont les nuages lourds semblent se sublimer.
Nul arbre, nul couvert et nul ouvrage humain
Ne dérobe au regard le studieux examen
De ce ciel tourmenté, profond et volubile
Qui change à tout instant sa parure mobile.

Ainsi, par courts trajets, tout en me promenant,
Me voici parvenu au bout d’un continent,
Dans quelques pas, je vais buter sur l’Atlantique
Et me trouver devant l’option de l’Amérique.
Comme tant d’irlandais qui, par nécessité,
Se sont expatriés, jadis, de leur comté,
Serai-je moi aussi décidé à partir ?
Mais non ! je sais déjà que, loin d’un tel désir,
Mon âme d’émigrant, sur ce tremplin, achoppe,
Je me sens attaché à notre vieille Europe ;
Au diable les Yankees et leur riche attirail,
Tout leur Eldorado ne vaut pas mon bercail ;
Foin de l’ouest prometteur, j’ai plus d’affinité
Pour les peuples d’ici, pour leur diversité,
Leurs villes et leurs us, leur vivante mémoire,
Leurs siècles de passé et de tragique histoire.
Oui, c’est un sentiment complexe et substantiel
Qu’indubitablement, j’ai pour cette Babel
Où des générations de sans noms ont bâti
Un patchwork coloré d’idiomes aboutis,
Où règne le bazar du cosmopolitisme
Mais où je sens qu’infuse un précieux humanisme.

Et tandis que la nuit m’enveloppe céans,
Sans même désirer atteindre l’océan,
Je rebrousse chemin pour aller où m’entraîne
Une faim de présence et de chaleur humaine,
J’ai envie d’un débit de boissons aguichant,
D’une pinte de stout, de rires et de chants
Et d’entendre, aux accents d’un violon tapageur,
Baragouiner tout haut l’autochtone gouailleur.