Vos
poèmes

Comme le trappeur du Grand Nord
A pour refuge une cabane
Contre les périls du dehors
Et la tourmente qui ahane,

J’ai quant à moi une maison
Dans un village de montagne
Pour fuir un peu la déraison
De la vie qui parfois me gagne.

Elle me vient de mes aïeux
Et, comme ces humbles personnes,
Dans ses entrailles tout est vieux,
Ses divers éléments détonnent.

Les meubles y sont claudicants
Et les assiettes ébréchées,
Les parquets usagés craquants,
Les courtepointes délavées.

J’y ai des souvenirs glanés
Toute ma brouillonne jeunesse
Et quelques objets surannés
Pour lesquels j’ai de la tendresse.

Un moulin à poivre, un bougeoir,
Un chauffe-plat sans plus de rôle,
Un compotier et un miroir,
Une antique lampe à pétrole.

L’hiver, pour combattre le froid
Qu’avec endurance, elle affronte,
Je dois alimenter en bois
Le souffreteux poêle de fonte.

L’été, au soleil se dorant,
Avec son groupe de voisines,
On dirait le soir sur un banc
Des petites vieilles lutines.

La nuit, le silence est profond
Seulement troublé par la cloche
Qui sans discontinuer pond
Les heures, de l’église proche.

Je me ressource en son giron.
Ici, la montagne me couve
Comme, pour ses petits en rond,
Le ferait une maman louve.

Mais le destin m’en écartant,
Les moments où j’y viens sont rares,
Aussi bien la plupart du temps,
Les araignées se l’accaparent.

Dans le calme et l’obscurité
Qui la closent en mon absence,
Elles viennent y abriter
Leur solitude et leur patience.