La quille
Je fus intégré dans la troupe
Un matin d’automne blafard
Afin de prendre, vent en poupe,
Dans un monde strict, mon départ.
Il fallut, de la discipline,
Apprendre la nécessité,
De l’ordre, épouser la doctrine,
Marcher au pas sans discuter.
Comme d’autres, durant mes classes,
Je dus me soumettre aux corvées,
M’armer, me faire une cuirasse
Contre les brimades larvées.
On m’a laissé partir en perme,
Parfois, pour me réconforter,
Pour que, dans ma tête, ne germe
Pas un esprit de révolté.
Je n’ai pas ménagé ma peine
Sur le parcours du combattant
Afin de gagner, hors d’haleine,
De tous les galons, mon content.
Fort d’une carrière honorable,
Ma période tire à sa fin ;
Je serai bientôt libérable
De ma condition de biffin.
Que montent en première ligne
Les bleus fraichement émoulus
Et qu’ils sachent se montrer dignes
De leurs anciens, et résolus.
Pour moi, les gars, bientôt la quille,
Bientôt « zéro », je chanterai
Et par la petite écoutille,
Enfin libre, je partirai.
