Le voleur de temps
Les aiguilles de l'horloge,
Du vieux clocher,
Se sont envolées.
Ses chiffres romains,
Devenus orphelins,
S'interrogent.
Sans les baguettes,
Du chef d'orchestre,
Les cloches inquiètes,
Se sont toutes tues.
Mais qui donc les séquestre ?
Au village ce matin,
Il n'y aura pas de pain.
Le réveil du boulanger,
Affiche quatre zéros,
Qui comme des sots,
Dansent en cadence,
Et l'appellent en silence.
Mais le brave artisan,
Dort profondément.
Levé par le chant du coq,
Le vieux maître s'affole.
Pas un élève n'est arrivé.
Seul à la grille de l'école,
Il peste contre cette époque,
Où plus rien n'est respecté.
Sur le quai de la gare,
Pas une arrivée,
N'est annoncée.
Pas un départ,
Aucun retard,
Pas d'affichage,
Aucun voyage.
Rails et hangars,
Dans le brouillard,
Font grasse matinée.
Et le chef de gare,
N'est pas arrivé.
Il a endormi le temps,
Le voleur de temps,
Pour réveiller les gens,
éveiller leurs esprits,
Sur le prix de la vie,
Celle que l'on précipite,
Qui ne va jamais assez vite.
Celle que l'on bouscule,
Les yeux sur la pendule.
Et il goûte son bonheur,
D'avoir aboli les heures,
D'avoir confisqué le temps,
Juste un petit instant,
Assez pour le rendre,
à qui n'ose plus le prendre.
Tisseur de Rimes
