Sépia
Un ou deux regards s'épient, sépias,
Dans leur cadre d'argent, gens !,
J'entends, les bruissements
Qui filent, coulent, fluides, sous les robes de soie.
Diptyque hagard, un quai.
Il y a des valises, la valse des sifflets,
Il y a des adieux, à peine murmurés.
Les voix qui pleurent de ceux qui meurent, un peu ;
Des sourires qui s'effacent sous la pluie de décembre.
Midi ; à la montre d'un homme -haut de forme,
Redingote-. Papiers pliés, les rails conduisent
Où personne ne veut aller, où personne ne veut partir.
Mourir. La mort est là, entre les bras
De ceux qui restent. Suaires ! Il ne restera rien
De ceux qui vont, soldats, sueurs !, sueurs froides athées ;
Ces coeurs, non, ne croient plus en Dieu.
Larmes d'hiver, armez vos hommes, désormais tas de chair.
Dans les wagons rouillés sonne le dernier glas. Au nom de ?
Au nom de quoi ? nom de Dieu... au nom de rien.
C'est une photo comme on en voit beaucoup.
C'est une photo-mémoire, photo-histoire,
Comme il y en a tant, qu'on ne regarde plus.
On les accroche, on les affiche ; on nous présente des héros
Mais le passé ne dit que ce qu'on veut qu'il dise.