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Laurine ROSIO

A une mère

Des cheveux emmêlés cachent son pâle visage
Sur lequel le temps a fait bien des ravages.
Si hier il paraissait jeune, éternel et lisse
Aujourd'hui sous les rides le coin des yeux se plisse.

Les épaules autrefois tenues bien hautes et fières
Sous le poids lourd du sort vers le bas s'affaissèrent.
La peau devint plus moite et se voûta le dos
Elle porte comme une croix son éternel fardeau.

Elle s'est tournée vers Dieu, priant et maudissant
De ses cris et des larmes un linceul se tissant.
Jadis elle était belle et les hommes à sa porte
La couvrait de bijoux, de fleurs de toutes sortes.

Que ce temps semble loin, révolu, oublié.
Malgré ses yeux rougis, son visage émacié,
Elle est pourtant encore d'une extrême jeunesse,
Mais porte ses vingt années comme une grande vieillesse.

A force de verser de douloureuses larmes
Son coeur s'est asséché, elle a jeté les armes.
Drapé dans son malheur d'une cape couleur soupir
Avec pour seule lumière celle des souvenirs.

Condamnée par le sort, sur le sol prostrée
Elle laisse son regard dans la nuit noire errer.
Le brouillard dans sa tête ne peut se dissiper.
Morte pour le futur, elle vit dans le passé.

Que de larmes et de cris son pauvre coeur meurtri
A laissé échapper. Mais qu'il est lourd le prix
A payer pour avoir tout simplement donné
Son amour à l'être qui de sa chair est né !

Les cieux sont-ils aveugles ? Ou n'ont-ils pas compris
Que cent fois elle aurait, pour qu'une fois il sourit
Livré à la faucheuse, sans un regret aucun
Sa vie et sa jeunesse, ses espoirs ? Mais en vain...

Las, elle attend que vienne enfin la délivrance.
Dans son âme ; plus une once de l'ancienne innocence ;
Plus de raison de vivre, le soleil est voilé ;
Plus de raison de croire que l'ombre va s'en aller.
D'une main ferme elle tient la lame salvatrice
Qui seule peut refermer l'horrible cicatrice.
Elle entre dans ses chairs et ses phalanges se serrent.
Doucement elle fredonne, les paroles qui bercèrent

Celui qui aujourd'hui n'est qu'un simple portrait
Qu'elle tient contre son sein. Rien qu'un simple portrait
Sur la vitre duquel coulent d'écarlates gouttes.
Ses yeux voilés se ferment, elle parcourt l'ultime route.