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Jean L INFONTE

Les patates I

I.

Dans le petit matin, je traversais la cour
De ce grand bâtiment où dormait encore
Une armée au repos, sans trompe ni tambour.
Au carré du ciel, je voyais éclore

Des nuages de lait, tout tâchés de café,
Et quand je poussais la porte de l’office
Le silence planait en lourd autodafé
Au bûcher du soleil qui d’un feu d’artifice

Faisait flamber le plomb des carreaux opaques.
Les fenêtres brûlaient au poids de l’attaque
Et par grandes plaques, la nuit refluait.

Du fourneau s’exhalait l’odeur torréfiée
Des mokas argentés dont les jus confluaient
Dans les tasses enflées, aux cœurs liquéfiés.

II.

Je sortais de nouveau à l’instant où passent
Les spectres éblouis, lents bouts de nuit
Avalés par le jour et quand tout l’espace
Les bannit sous terre aux puits d’ennui.

L’air était si léger et dans son goût mouillé
J’étais immobile. Rumeurs cristallines,
La terre s’exhalait et venait barbouiller
Ma figure froissée de sa sueur fine.

Je priais l’Olympe. J’aimais les histoires
Que les livres usés, pareils aux grimoires,
Rangeaient en chapitres que ma mère lisaient

Un par un chaque soir, pour ma récompense
D’avoir été sage et sa voix irisait
Aux reflets, fers sur fers des armes, la danse.