Je ferme les yeux Et ma ville natale Me revient à l'esprit En images latentes
Défilent alors En désordre parfait La boucherie d'en face Le comptoir sombre De la quincaillerie La boutique trop étroite De la vieille mercière Qui fut boulangère Dit-on En ses jeunes années Les vitrines mal éclairées De l'épicerie Et la verrue de l'épicier La grande maison du dentiste voisin L'officine de mon père pharmacien
Dites-moi si j'ai tort De m'attarder un peu Au fond brumeux De ma jeunesse De vouloir qu'en moi renaissent Le marché fleuri Du mardi matin La longue rue des Récollets La rue des Chats Le Marché aux Poulets La rue du Miroir Et la rue du Poivre où j'habitais
Je revois les eaux glauques De l'étang du parc public Et les cerisiers roses Du boulevard du Moespik
Je me souviens aussi D'un poissonnier phtysique D'un plombier homo D'un petit bonhomme Assez vieux Plutôt gros Qui parlait tout seul Et toujours en anglais Il s'arrêtait souvent Pour voir l'heure qu'il était A la montre Qu'il tirait Très lentement de son gousset