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Giovanni BENINI

Les sortilèges de la nuit: Kaspar hauser

Kaspar, Kaspar, pauvre orphelin des météores!
Tu contemplais les cheveux blonds des champs de blé
Onduler sous les caresses des vents d'été,
Sur la rivière où scintillaient mille trésors,
Un héron volait dans le sillon de l'aurore.
A la herse du vieux château aux hellébores,
Tu accrochais les rêves précieux des licornes
Que tu cueillais aux pâles branches des viornes.
Quand la nuit refermait ses lèvres constellées,
Tu écoutais battre le cœur lourd des forêts,
Tu poursuivais les cerfs aux ramures argentées.
Dans les sentiers obscurs chuchotaient les secrets
Qu'enfant tu confias au feuillage frémissant
Quand des tisons rougeoyants traversait l'éther
Eclairant les stèles d'un ancien cimetière,
Tu guettais impatient l'heure des nécromants.
Le brasier des étoiles crépitait alors,
Le sabbat commençait par les cris des sorcières
Qui flottaient en tournoyant dans l'air délétère,
Venaient bientôt les stryges, la fureur des morts,
Des visages haineux, des masques de folie 
Et la peur qui te prit quand tout s'évanouit
Dans un atroce vertige de hurlements
De tombes profanées, de fantômes jurant!

A Nuremberg, un matin on t'a découvert
Comme un épouvantail attaché à sa croix,
Triste somnambule d'origine princière,
Prisonnier d'un mystère que rien ne leva,
Car un soir, un poignard a fermé tes paupières
Et la lune s'est noyée dans un lac de sang
Qui bientôt inondera l'Europe outrancière,
Orpheline elle aussi de ses grandeurs d'antan.