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Francis LEDER

Le cerf narcissique

Un cerf, en héritier de l’esprit de Narcisse,
Aimait à se mirer dans l’eau d’un étang clair
Il admirait ses bois, grandioses appendices
Qui lui poussaient au front, chaque an, après l’hiver.
Rien ne se comparait à sa noble parure
Selon son opinion. Il se trouvait très beau
Et se voyait un peu en roi de la nature.
Il se reconnaissait un unique défaut :
En-dessous du cuissot, il n’aimait pas ses pattes.
Il les trouvait trop fines, manquant d’épaisseur.
Il se voulait athlète et, quoique délicate,
La ligne de ses jambes manquait de vigueur.
Un jour où, à nouveau, pour jouir de son image,
Marchant dans les sous-bois, il cherchait son étang
Et faisait son chemin à travers le ramage,
Il aperçut au loin, un gros attroupement :
Une meute de chiens, et des hommes en chasse
Qui avançaient vers lui après l’avoir pisté
Il se savait rapide, comme ceux de sa race,
Mais il lui fallait fuir avant d’être attrapé.
Ses jambes mal aimées, là, firent des miracles :
Avec souplesse, puissance et agilité,
Elles évitèrent mille pièges et obstacles
Jusqu’au moment tragique où le cerf fut coincé,
Les bois enchevêtré parmi de vils branchages.
Irrémédiablement bloqué, il fut rejoint
Par les chiens, victime du funeste arrimage.
Faut-il dire ici la fin de la chasse ? Point !
Mais je dirais bien une sorte de morale :
On peut être sauvé par la partie de soi
Que l’on n’estime pas ; quant à l’issue fatale
Elle nous vient souvent d’en quoi nous avons foi.