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Etienne CHAMPOLLION

Peinture Orageuse

Que j’aime voir le ciel sombrâtre et ténébreux,
Recouvrir les forêts, les mers et les montagnes,
D’un austère manteau atone et malheureux,
Parfumé de l’ennui et les froids en compagnes.

Des rouleaux embrumés colorés du néant,
Au firmament vaincu lentement se déploient,
Des portes de l’Enfer au Paradis béant ;
Au lointain, angoissés, mille chiens aboient.

Fenêtres et volets claquent avec fureur,
Détone enfin la pluie et sous ses longues trombes,
Les défunts martelés sous la boue et l’horreur,
Se lèvent doucement et sortent de leurs tombes.

Soudain ! et sans pitié face à nos cœurs bénis,
Tel un vivant marteau venant briser la terre,
Dans un fracassement aux échos infinis,
Jusqu’ à froidir nos chairs vient frapper le tonnerre !

Au creux de ce tableau comme chaos des Dieux,
L’éclair en froid d’argent reniflé des aveugles,
S’en va illuminer la colère des cieux,
Et l’on entend au loin les animaux qui beuglent !

La ville transformée en un sombre marais,
Fait de ses boulevards de funèbres rivières,
Charriant nos espoirs, nos rêves et portraits,
Sur des chemins trempés vers nos heures dernières.

Les vents tournent en fou arrachant toutes fleurs,
Symphonie orageuse où les pianos vacarment !
Et toi belle faucheuse aux funestes couleurs,
N’est-ce pas là ton nid où s’aversent des larmes ?

Oh ne crains rien lecteur, rien n’est plus mortifiant,
Qu’au lendemain des eaux quand un marbre silence,
S’empare de ces lieux décimés. Edifiant
L’absence mortuaire alliée à la démence !