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Christian CALLY

Ma mère

Le petit caporal le fit quitter sa mère,
Ils partirent au loin, transportant le tonnerre,
Ils conquirent des rois, il devint lieutenant,
Et sous le grand Empire, il fut fait commandant.

Dans Berlin, l'empereur le décora lui-même
De la légion d'honneur, décoration suprême ;
A Vienne, Bonaparte admira son courage,
Le nomma général, en plein champ de carnage.

Après six longs hivers, loin de sa douce France,
Valeureux et puissant, fier de son apparence,
Il allait voir sa vieille, au pays près du bourg ;
Où se rendaient, aussi, trois soldats de Cherbourg.

L'un, lieutenant très jeune, élevait sa voix claire,
Enumérant gaiement les titres de sa mère ;
Elle était, paraît-il, d'un vieux sang régalien,
Avec les rois de France, elle avait un bon lien.

L'autre, un vieux commandant, rêvait de sa jeunesse,
Il se voyait jouant avec une princesse,
Son père, ambassadeur de Paris à Berlin,
Mourut sur l'échafaud, comme un simple faquin.

Le troisième, morose, évoquait à voix basse,
(sans voir tout près de lui la pauvre vieille lasse,
Qui glanait, ça et là, quelques épars épis,
En cet immense champ couvert d'un blanc tapis,)

Son château de Cherbourg, admiré par son style,
Et ses machicoulis à carrure subtile.
Il parla de sa mère, attendant son retour
Au vieux manoir aimé, dominé par sa tour.

Le général, soudain, voit la vieille glaneuse,
Il s'élance vers elle, et contre sa vareuse,
La presse avec amour, l'embrasse tendrement,
C'est ma mère, messieurs, leur dit-il fièrement.

Christian Cally.
1950-2001.