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Christian CALLY

Découverte macabre !

La pipe au bec j'allais, les deux mains dans les poches,
Mon feutre sur l'oreille et chaussé de galoches,
Je respirais, heureux, l'air salubre des bois
Qui soufflait doucement, silencieux et sans voix.
La sombre voûte était recouverte d'étoiles,
Qui clignotaient gaiement à travers tous ses voiles ;
Le miroir du soleil, très paresseux ce soir,
Ne s'était pas levé sous le grand dôme noir.
Je flânais dans ce bois que la nuit rendait morne,
Et m'assis, un moment, sur une froide borne,
Je me sentais en paix, quand une forte odeur,
Me suffoqua, soudain, et fit flancher mon coeur.
Je m'avançais, prudent, ô, loin d'être intrépide,
De l'endroit exhalant cette senteur fétide ;
Je m'attendais de voir, très vraisemblablement
La charogne d'un chien qui gisait en ferment,
J'allais m'en éloigner au plus vite possible,
Pour respirer l'air pur, loin de ce coin nuisible,
Quand soudain, un sanglot glaça mon coeur, mon sang,
Et je faillis tomber dans un obscur étang.
Des tristes pleurs d'enfant, des sanglots de détresse,
Sinistres, émanant, là, d'une touffe épaisse,
Me donnèrent courage, et me pliant en deux,
J'entrais, en halletant, dans ce reduit hideux.
Ce que j'y vis,mon Dieu, horrible tragédie,
Sans doute, résultat de quelque perfidie ;
Là, gisant, sur le sol, spectacle ébouriffant,
Un cadavre de femme, étreignant son enfant.
Le nouveau-né suçait goulûment la mamelle,
Que lui avait offert la pauvre jouvencelle,
L'enfant me regarda, ce qui me fit frémir,
Je le pris dans mes bras et me mis à courir.
Tout essoufflé, hagard, ayant perdu haleine,
Mon paquet dans mes bras, j'arrivais dans la plaine ;
Je m'arrêtais, m'assis ; mes cheveux étaient blancs,
Je perdis ma jeunesse en ces quelques instants.
Je me mis à penser à cette pauvre femme,
Qui, comme un chien, là-bas, gît d'une mort infâme ;
Elle mourut donnant la vie à cet enfant,
Qu'elle conçut, croyant aux voeux de son amant.
Sans sépulcre, sans croix, sans même une prière,
Elle choisit ce lieu pour devenir sa bière ;
De ce monde elle a fui son inhumanité,
Et trouvé son repos pour toute éternité.
Sa mort est si tragique et pourtant magnanime,
Je dois donc respecter qu'elle reste anonyme.
Ses beaux yeux sont ouverts, regardant l'infini ;
L'enfant est dans mes bras, calmement endormi.