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Chimay ORDUVAL

Sonnetine

Sur la grand-place aux lis où fleurit l'anathème,
Un lit fleurdelisé réchauffe un peu de cendre.
Près de l'âtre, un tison respire et sa cassandre,
Sa marâtre maîtresse effeuille un chrysanthème.

La boiserie laquée, le sommier palissandre
Ont vu bien des laquais se payer de satin.
Seul, un vieux sommelier n'a voulu condescendre
A boire le vin blanc des collines d'airain.

C'est un clairet très frais qui coule sans pépin,
Un fleuve d'or qui prend source sous la cambrure
Mais la vase, l'ignare, exècre les dorures,
Puisqu'au moindre vent d'ange, elle noie les raisins.

C'est le sort réservé aux terrestres liqueurs
Que de n'être qu'un temps l'embrun gris et vainqueur,
De mêler l'ambre gris aux rougeurs des framboises.

Quant à tous ces gardiens de vertu et leurs ordres,
Ils ne font qu'épicer une pudeur grivoise :
Dans tout vertugadin, les désirs sont désordres.

Eau, céans défie-toi de ces filles matoises,
Aile et gant, ce sont là leurs crocs et leurs babines :
Elles n'ont pas tôt dit qu'elles vous embobinent.