Vos
poèmes

Poésie Française : 1 er site français de poésie

Vos<br>poemes
Offrir
ce poème

Carole KADDOUR

En capitale

J'aurais dû longuement m'asseoir
Pour admirer la ville,
Capter la rumeur des comptoirs
Ou celle d'une terrasse tranquille.

J'aurais dû fouiner, traîner d'aventure,
Tout en dénichant quelque endroit magique,
Presque m'égarer d'urbaine sinécure
Au remord secret du strident trafic.

Dans la douche folle du piéton pressé,
J'aurais fait aussi un pèlerinage
Et revisité mes anciens quartiers,
Malgré au lointain, l'odeur de l'orage.

Alors j'aurais fui au funiculaire,
A moins qu'à l'abri d'un grand magasin
J'eusse enfin trouvé la meilleure affaire
Et fus maquillée par d'expertes mains.

J'aurais dû encore flâner vers les squares :
Y accumuler mil rires en arpège,
J'aurais trimballé une "série noire"
Mais sans pouvoir lire à cause du manège !

J'aurais déniché chez les bouquinistes
Une vieille gravure de la Cité des fleurs,
Puis au bord des quais croisé des artistes :
Hôtel du Palais, rêvant d'ascenseur !

En montant le long de la rue Belliard
J'aurais fait les puces en fin de journée,
Tu m'aurais rejointe un peu au hasard
On n'aurait pas pu se téléphoner !

J'aurais afin de tout remémorer
Arpenté Tolbiac, en vélo, l'école,
Barbès, quat'saisons et le Châtelet
Puis de la Chapelle, square des Batignolles.

Au détour d'églises, j'aurais dû prier,
Donner au clochard plusieurs cigarettes,
Cueillir une guitare à Saint-Germain-des-Prés
Et puis tard le soir chercher ma baguette…

Au bout d'un passage alors inconnu
Soudain fatiguée, j'aurais découvert
Sous une tonnelle verte et incongrue
Deux bancs : oxygène prés d'une fontaine d'air…

J'aurais dû choisir les voix aériennes,
Me gaver de toits, de couloirs, de rues ;
Bus, petite ceinture, Maraîchaux, Vincennes,
Périph', publicité, tintamarre, cohue !

J'aurais … j'aurais pu rester à Paris
Sans collectionner les tickets-reliques,
J'y retournerai : terrasses et ciel gris
Les souvenirs n'en seront que plus chics !