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Benoit MORARD

Naufrage

Un drap qui tombe,
Le soleil qui flambe.
L’eau noircie
Et se désagrége.
Le reflet de l’ombre
Eblouie ces gens
Qui n’aiment que boire.

Alors, l’autre dit quelque chose
Si bas, qu’à peine le silence s’entend.
On lui demande de parler un peu plus fort.
Il répète, plein de volonté.
On le voit hurler,
Mais pas un bruit ne sort.
Alors, on hausse les épaules,
Et nous nous retournons.
Et déjà est-il oublié.

Les volets sont fermés,
Les stries de lumière
Attaquent le lit,
Le percent de toutes parts
Le soulèvent et le basculent,
Et le voilà qui flotte
Pareil à un vaisseau en flamme
Prêt à sombrer sous ses masses
D’eau qui attendent.

Qui attendent, bouches toutes ouvertes,
Pareilles à des furies hurlantes prêtent
A dévorer et broyer par leurs
Mâchoires édentées,
Qui, déjà, ont faim de ce bois béni.

L’arbre tressaille comme d’allégresse.
Mais, qui sait qu’il tremble de toutes ses feuilles ?
Qui sait qu’il a vu le meurtre s’accomplir ?
Qui sait que ses âmes le pourrissent ?
Il a peur de mourir.
Mais il sait qu’il doit, alors il laisse faire.
Il a assez vécu, assez vu.
L’amour l’a pris tant de fois que sa tâche
Est largement terminée.
Les amoureux qui l’ont admiré longuement
Sont autant de feuilles qu’il porte en lui.
Il peut partir, les saisons l’ont suffisamment applaudi.
Il n’a plus peur de mourir,
Puisqu’il sait qu’il est immortel
Et que rien, rien ne pourra l’ensevelir.
Alors, il se jette dans les bras doucereux
Des lames piquantes.