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Aubin VERILHAC

Mémoire centenaire

Soldat preux et beau mire cette ombre au miroir
Son œil souillé te jugera jusqu'au champ de gloire
Ce reflet pourfendu est la gueule naguère au trépas
Qui parlerait plus clair si la bouche n'y manquait pas

Ces lettres que vous m'adressiez depuis la poudrière
M'ont laissé ces vers que je récite le soir en prière
"mon cœur s'ennuie de vous revoir sitôt victorieux
Car ma raison s'égare depuis l'aube de nos adieux"
Mais voilà le temps a passé les livres ont jaunis
Et les bombes se sont tues et la guerre est finie
Nos gamins sont rentrés boiteux ou bien farouche
Labourant aux champs l'airain de nos cartouches

Sous des ombres spectrales c'est la vie qui renaît
Annonçant un timide espoir de derrière les genêts
Les boyaux et les sillons sont des tombes de boue
Où s’ordonnent ces corps roide qui dorment debout

Artilleur triste et pâle tu te souviendras sans cesse
Comme Verdun se souvient encore de ta jeunesse
Tu marchais vers le front azuré de ta capote neuve
Ne sachant pas que là-haut on crève pour la preuve

Les souvenirs de l'ennemi dont l'ordre anime la botte
D'un enfant famélique au sein de sa mère qui sanglote
De ces compagnons d'armes qui tombèrent en révérence
Font ce jour fleurir à nos boutonnières le bleuet de France