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Arwen GERNAK

Gel à coeur fendre

Poète au visage ténébreux, aux traits émaciés
Par les nuits sans sommeil, nuits sombres
Laisse-moi donc effleurer d’un doigt léger
Chaque sillon creusé sur tes joues.
Tu frémis, distrait par cette intruse
Qui te ravit aux songes d’Eternité.
Elle ignore qu’elle frôle des mystères
Où tu te perds si souvent. Elle joue
Une sonate au clair de mers insondables.
Poète, il fait gel à cœur fendre
Quand tu t’égares sur des rives lointaines.
Tes yeux de glace s’abandonnent
Aux rimes chaudes et versent des larmes
De soleil noir que les mésanges aiment boire.
Laisse-moi pénétrer ces contrées secrètes
Sans cartes et à tir d’âme, ces forêts denses
Où le chant des oiseaux est un cri d’amour.
De ta voix fêlée par des nuits à hurler,
Tu appelles une amante que tu connus un jour
Et que je ne connais pas. Tu souris un instant.
Est-ce ma caresse présente ou son souffle éteint
Qui déplisse ton front ? Je découvre la haine.
Poète, au regard à nouveau fuyant, tu t’exiles
Dans ces mondes où tu es seul, éternellement.
Tu refermes les battants du silence et disparaît
Sous ma main qui tremble maintenant.
Je suis sur la banquise de tes songes. J’ai froid
Comme dans la mort ou dans l’oubli.
Ma caresse s’enfonce en tes crevasses cachées.
Ton visage foudroyé se tord : un éclair
De folie entre tes dents illumine, un court instant,
Pour moi, rien que pour moi, l’Eternité.
Tu m’as ouvert les portes de tes enfers.
Tu m’as montré ta Gouve en un baiser.