Mon doux non c’est Zéphyr Mais mon vrai nom c’est courtisane Mon père me l’a donné Parce qu’il sied bien d’aller vers Dieu En lui portant quelques cadeaux Quelques présents pris à sa table Et mon doux nom me vient De ce que je suis la plus légère A élever Pour embrasser ses ans
A la belle saison le soleil règne en maître Il ne fait pas de doute que les robes m’avantagent Pour plaire je me compare aux filles de mon âge Je songe devant la glace à celle que je vais mettre
J’ai perdu ma fraîcheur mais j’ai pris des couleurs Je sais lire désormais dans le regard des hommes Je les sais prêts à tout pour embrasser ma pomme Je ne fais guère confiance à tous ces beaux parleurs
A leur vue bien souvent mon cœur bat la chamade De troubles sentiments me causent des vertiges Ces beaux indifférents au sourire enjôleur
Comme des papillons volent de fleur en fleur Ils se croient tous des ailes des as de la voltige Plus prêt à jouir qu’à me passer de la pommade
Malgré les crèmes ma peau se fane et se dessèche Des rides se creusent mes joues s’affaissent Mes seins retombent comme des outres vides mes fesses Ne sont plus aussi douces qu’un duvet de pêche
L’âge venant j’ai pris du poids de l’embonpoint Je n’ai plus l’apparence d’une figure de proue Je dois me maquiller et me teindre de roux Et je prends plus de temps pour faire la mise au point
Mon esprit s’est aigri je ne fais plus qu’attendre Je n’ai plus goût à rien plus jamais je ne ris Et petit à petit j’ai perdu l’appétit Mes cheveux gris souris ressemblent à de la cendre